Joe Biden à son comité de campagne de Des Moines, Illinois, centre d’appels en janvier 2020. Photo : Gage Skidmore.

Samedi, après quatre jours d’incertitude, Joe Biden a été élu quarante-sixième président des États-unis. Pour autant, Donald Trump refuse toujours de concéder sa défaite, estimant qu’on lui a « volé » l’élection. Le chemin qui sépare l’ancien vice-président de Barack Obama de son investiture officielle le 20 janvier risque donc d’être encore parsemé d’embûches.

Par David Marquet

Après quatre jours d’incertitude, c’est un réel soulagement pour une bonne partie des Américains. Joe Biden, en remportant les vingt grands électeurs de Pennsylavanie samedi, a été élu quarante-sixième président des Etats-Unis. Les démonstrations de joie dans la rue un peu partout dans le pays le prouvent, comme sur ces vidéos de Franceinfo.

Quatre ans d’un cauchemar éveillé ou Donald Trump aura continuellement repoussé les limites du pire, à tel point que chaque fois que l’on se disait « il ne pourra pas aller plus loin », il creusait encore un peu plus dans, en vrac, l’indécence, la stupidité, le racisme, l’homophobie, le discrédit permanent à l’encontre des journalistes, et une mégalomanie galopante, cristallisée par ce tweet parmi tant d’autres.

Sans oublier bien sûr les soupçons de collusion avec la Russie pour remporter la présidence, comme explicités dans le rapport Mueller dans cet article du Monde. Car même si ce rapport, consultable ici en anglais sur le site du gouvernement, n’a pas établi la preuve formelle de la culpabilité de Trump, il a certainement contribué un peu plus à ternir son image aux yeux de ses détracteurs.

Néanmoins, de même que son élection, que tous les médias considéraient alors comme impossible, excepté le Jefferson Post, a surpris le monde entier, son départ effectif de la Maison Blanche ne se fera sans doute pas sans heurts. Pour commencer, le milliardaire refuse de reconnaître sa défaite, assurant qu’on lui a « volé » l’élection, et, chose inédite dans l’histoire des États-Unis, il n’a pas appelé son adversaire pour le féliciter, comme c’est la coutume.

Par ailleurs, le processus électoral américain impose un calendrier très strict au président élu avant d’être investi, détaillé ici par le Figaro. C’est la période du « canard boiteux » (« lame duck« ), une expression du dix-huitième siècle utilisée au départ pour parler d’un agent de change qui ne pouvait honorer ses dettes, et qui fut utilisée en politique un siècle plus tard pour désigner un président élu mais qui n’exerce pas encore ses fonctions. Ce qui attend Biden : fin du dépouillement des urnes le 8 décembre, vote des grands électeurs le 14, élection partielle du Sénat le 5 janvier, élection du président par le Congrès le 6, et enfin l’investiture officielle le 20 janvier 2021. C’est donc loin d’être fini pour lui. Et la clôture que Donald Trump a fait ériger autour de la Maison Blanche pour se protéger d’éventuels manifestants au lendemain des élections n’est pas non plus un signe rassurant… même si c’est relativement grotesque, relève Courrier international.

En outre, d’ici l’investiture, Donald Trump fera tout pour remettre en cause la victoire de Biden. Arguant de fraudes massives sans fournir la moindre preuve, il a déjà réuni une armée de juristes et déposé au moins sept recours dans six Etats, explique L’Obs : la Pennsylvanie, le Michigan, l’Arizona, le Nevada, la Géorgie et le Wisconsin. Que ce soit pour demander un recompte des votes (le vote par correspondance massivement utilisé par les électeurs démocrates en raison de la pandémie de Covid-19 ayant été décrié par Trump tout au long de sa campagne) ou dans certains cas, les faire purement et simplement invalider.

Enfin, même quand il sera effectivement en charge du pays, Joe Biden aura fort à faire. Il va hériter d’une nation divisée comme jamais, entachée du meurtre en mai du noir-américain George Floyd par un policier, et qui a provoqué des vagues de protestation dans plusieurs villes des États-Unis, souligne l’Express. La violence des affrontements entre forces de l’ordre et partisans du mouvement Black Lives Matter qui ont suivi sont sans précédent dans le passé récent des États-Unis.

Que Trump ait félicité en direct à la télévison lors du premier débat les « Proud Boys », un groupe suprémaciste blanc, a rendu encore plus explosive une situation déjà incendiaire. Et ses supporters ne sont pas prêts, eux non plus, à concéder leur défaite, relève Associated Press (en anglais).

Biden a beau avoir déjà marqué un point non négligeable en faisant élire Kamala Harris première vice-présidente des USA, noire de surcroît, comme le rappelle les Jours, il leur faudra à tous deux beaucoup, beaucoup d’énergie et de diplomatie pour réussir à réconcilier ces États… désunis.